Les jardins dans la ville
Lillian Nobilet
La fin d’un oxymore ?
Parler de végétalisation urbaine à Clermont-Ferrand a longtemps été un oxymore. Ce qui prévalait c'était l’idée que la nature était suffisamment présente autour de la ville, pour que nous n’ayons pas besoin de penser sa place dans la ville. Mais cela a changé, et la demande sociale pour une végétalisation des espaces urbains, nourrie par une prise de conscience de l’anthropocène, est de plus en plus prégnante. Il y a un enjeu utilitariste pour un air plus sain, pour des îlots de fraîcheur, des lieux de repos. Mais cela va au-delà, et sans doute faut-il y voir là aussi une reconfiguration de notre rapport à la nature, au vivant.
Les parcs dans les villes accompagnent la révolution industrielle
Pourtant, à y regarder de plus près, la préoccupation du végétal n’a jamais complètement disparu des villes, fussent-elles industrielles. En effet, la question des parcs publics a très tôt été le corollaire de la révolution industrielle. D’ailleurs, Clermont-Ferrand et son jardin Lecoq l’illustre également. Il s’agissait de répondre alors à une préoccupation hygiéniste.
Napoléon, quand il demande au Baron Haussmann de repenser l’urbanisme parisien, lui demande de créer des espaces verts. En 17 ans, 2000 ha seront créés, dont le parc des Buttes-Chaumont, qui est une prouesse technique. Il est dans un style anglais, c’est-à-dire qu’il cherche à imiter la Nature. Son Créateur, Adolphe Alphand, a voulu créer un paysage de montagne sur un espace sur lequel au départ rien ne pousse, puisque c’est une ancienne carrière !
L’agriculture urbaine
Mais la densification des villes, la métropolisation, l’artificialisation des sols et la raréfaction des terres agricoles ont peu à peu fait émerger une demande nouvelle, et vraisemblablement ce mouvement a été amplifié, ou accéléré, par la crise sanitaire et les confinements. Il ne s’agit pas seulement d’une sorte de renouveau bucolique, mais cela renvoie également à une préoccupation de souveraineté alimentaire et à la prise de conscience de l’éloignement entre les producteurs et les consommateurs, induit par l’industrie agro-alimentaire. Dans le même temps, nombre de fermes se développent avec une volonté de s’inscrire dans une logique éducative et d’engagement en faveur du développement durable. C’est un mouvement global, avec un très fort développement aux USA.
Plus près de chez nous, le Programme Alimentaire Territorial porté par Clermont Auvergne Métropole souhaite freiner l’étalement urbain et même développer la ceinture verte. Il s’agit de relocaliser une production agricole. La Ferme de Sarliève illustre cette dynamique. Classée zone inondable, et donc préservées, ces terres situées près du Zénith de Cournon, qui appartiennent à Terre de Liens, sont exploitées, par une Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC), par des activités d’élevage et de polyculture.
Enfin, les villes, que ce soit leur centre ou leur couronne, sont au cœur de transitions qui laissent voir l’évolution de nos attentes vis-à-vis de ces dernières : reconnexion au vivant, à la nature, préoccupations alimentaires, prise de conscience de l’étalement urbain.