La musique ce voyage intergénérationnel qui fait vibrer les molécules… De l’Iran à Champeix en passant par le Bayou
Sandrine Binet
Elle a toujours été là, la musique. Depuis l’enfance. Des 45 tours des Beatles de papa rangés près du mange-disque (#platine vinyle), au walkman à cassettes autoreverse (oui, je confirme, je suis née au siècle dernier !) en passant par les BO de films qui t’accompagnent à tous les âges et que tu redécouvres parfois comme une madeleine oubliée dans un tiroir.
La musique est un langage. Universel. Un Euréka pour moi un jour dans un cours de solfège : bon sang mais bien sûr ! Ça explique TOUT ! Les soupirs, les double-croches, les silences, le tempo, les dissonances, le rythme… Ce jour-là, c’est comme une petite révolution, un passage de boucle qui déplace le regard et l’oreille interne. L’apprentissage du vocabulaire et de la grammaire prend toute sa place, avec la vigilance toujours qu’elle ne vienne pas étouffer le souffle premier. Une danse harmonieuse et complexe, une contrainte qui libère le verbe musical.
Si la musique est un médium et l’artiste-interprète un médiateur, certains morceaux ont un air d’éternité. Les cycles de vie ont ceci d’étonnant qu’ils nous amènent à revisiter les myriades de disques à usage unique accumulés au fil des ans pour retrouver la pépite originale. Celle qui a inspiré des générations complètes, qui a fait vibrer les molécules dans les chambres d’ado et sur la piste de danse internationale.
Il y a l’Art, certes ; mais il y a aussi la manière (démasquée je suis : j’écoute les disques de Brel de papy !). Les reprises, il y en a qui vous touchent directement au cœur-esprit.
La musique est décidément un langage et un générateur de vibration.
Aline et Manu, ça fait un moment qu’ils pratiquent le voyage musical. Je dis « voyage » à dessein parce les accents de leurs notes sont allés visiter quelques coins de la planète.
Chiche, on part en voyage express en se mettant dans un petit coin de leur sac à dos !
Escale en Iran d’abord où l’on découvre la pratique non-écrite de la musique, l’improvisation modale et la transmission cœur à cœur : « cela ressemble à une transmission de Maître à élève, un contact direct et prolongé avec le professeur qui crée un osmose » nous livre Aline et Manu. La musique iranienne est rythmique, monophonique et accompagne très souvent la poésie. Elle est même calée sur les mots et rythme de la diction.
Pour l’escale suivante, ils nous emmènent aux États-Unis. Rencontre avec les volunteers (bénévoles) et les écoles d’immersion linguistique en Louisiane pour partager la chanson française. Découverte de la musique du Bayou. Aline a été frappé par la manière dont la musique est présente dans la vie des habitants et des jeunes qui se lancent sans inhibition sur l’instrument sans connaissance du solfège. Manu précise à quel point la musique américaine est spontanée « la musique classique pour eux, c’est le Jazz ! Ça swingue, c’est subversif aussi. »
Et puis l’Irlande. L’hiver 2001. Un voyage fondateur. Qui confirmera leurs goûts pour les reprises et qui leur fera décider quelques années plus tard de s’y consacrer exclusivement avec la création d’un répertoire et les carnets de chant. « Il y a eu les soirées musicales à Champeix, on s’est retrouvé devant 3 générations. Des amis de nos âges venaient avec leurs enfants et leurs parents. Ça a été le gros coup de cœur : dans le bar tout le monde se tenait par le coude en chantant les Amants de St Jean. Les gens participaient, c’était interactif, convivial et rassembleur. » Une évidence. La musique rassemble.
Après ce détour dans l’espace-temps infini d’Aline et Manu, retour aujourd’hui à Clermont. Ils me partagent avec toujours la joie et le sourire au cœur la rencontre avec les résidents dans les maisons de retraite, la liberté qu’ils y trouvent, la facilité de dialogue et l’irruption du rire et du naturel « pour les résidents, nous sentons à quel point les morceaux interprétés sont connectés à des souvenirs forts et chargés émotionnellement pour eux. Il y a beaucoup de joie délivrée. Cela permet de désapprendre aussi une certaine attente de reconnaissance immédiate ». La musique est un soin. Elle épanouie ceux qui l’accueillent et la respire.
Aline et Manu sont de ceux-là. Ceux qui inspirent et expirent humblement la musique.
Un peu comme le va et vient de l’accordéon d’Aline ou comme les curieux instruments rythmiques que fabrique Manu. Mais ça c’est une autre histoire…
Pagan Poetry – I follow river – Le Cargo Pur-Sang – I was made for lovin you Thomas Février – Liverpool – Café de la Danse (pour le Beatles spirit) Khâro – Staying Alive (pour l’esprit des bois)